Au bout de mes chaussures
Au bout de mes chaussures
Au bout de mes chaussures
Quelque chose cloche.
Ce soir, buffet de fête pour le deuxième jour de l'an. Et comme ils jouent ici à fond la carte de l'echange culturel sous toutes ses formes, le menu était assez local.
Margot s'est découvert une passion pour ... les oreilles de cochon. On a dû l'arrêter, elle en a grignoté allègrement toute une assiette.
Photos suivront, promis ....
Dilemne ... Il faudrait que je prenne le temps de raconter notre voyage de fin d'année mais je cherche encore les mots assez colorés, suffisamment parfumés pour décrire le séjour qui nous a donné envie de demander la nationalité thaï et à s'installer comme vendeuse de gaufres belges sur les marchés flottants...
http://www.foreignpolicy.com/articles/2012/01/18/smog_beijing_pollution_photos#10
Dur dur la vie de TaiTai …
Aujourd’hui je joue à « Retour à la dure réalité », comprenez je suis seule à la maison sans Ayi (partie en formation premiers soins) et sans chauffeur (parti la conduire et en congé en vue d’une semaine prochaine bien chargée).
Et non je ne vais pas venir me plaindre de l’épreuve insurmontable que représente le rangement de la cuisine ou la mise en route de lessives, je n’ai pas trop perdu la main et j‘apprécie même ma solitude. Enfin j’appréciais car un coup de sonnette inopiné est venu déranger le calme inhabituel et c’est là que je me suis souvenue qu’Ayi est non seulement notre fée du logis, nounou, babysitter, homme –enfin femme- à tout faire et bien plus, mais aussi mon interprète…
Deux ouvriers, des seaux et tout un charabia auquel je ne comprends rien, ils s’énervent et me demandent d’appeler Ayi, quand ils comprennent qu’elle n’est pas là ils me regardent comme une extraterrestre car quelle TaiTai sensée resterait chez elle sans Ayi ? Enfin bref deux minutes plus tard ils étaient en train de démonter ma porte d’entrée. Je suppose que ça a un lien avec ma demande de nouvelles serrures (pendant que j’écris l’un des deux traverse le salon en chaussettes et s’attaque à la porte arrière – dire que je parlais de solitude …) mais je ne peux que supposer !
A part ça depuis notre retour de vacances tout va plutôt bien.
J’ai décidé qu’il était grand temps d’approfondir mes connaissances culinaires asiatiques car si après trois ans à Pékin mes capacités se limitent à rajouter du gingembre et de la sauce soja dans n’importe quel plat bien belge, je risque de perdre ma réputation d’amateur des fourneaux !
Après mes cours dans le Yunnan je m’étais donc inscrite la semaine dernière à un cours de cuisine du Sichuan, mon palais avait eu le temps de se remettre de notre escapade épicée à Chengdu. Jacky m’avait déposé un peu inquiet par la dernière lubie de Madame-Eu (=moi) au coin du Shique Hutong, dans le centre de Pékin. Un vrai hutong, comme il en reste de moins en moins suite au ballet incessant des bulldozers dans cette ville, et non pas un hutong retapé à la mode avec des boutiques dernier cri. Véritable dédale de ruelles et de maisonnettes, labyrinthe de cours intérieures et échoppes, petits marchands ambulants qui s’annoncent en criant et vieillards jouant au mahjong sur le trottoir, je finis par y découvrir la porte rouge qui abrite la Hutong School.
Notre prof pour la matinée commence par nous expliquer les ingrédients, différents piments, sauces en tous genres et condiments non identifiés jusqu’ici. L’astuce de la cuisine au wok est de tout avoir découpé et préparé à l’avance, puisqu’une fois dans le wok la cuisson ne prend tout au plus que quelques minutes. Jusque là ça va, je suis. Puis elle se lance dans une explication enthousiaste sur l’indispensable équilibre Yin-Yan dans l’univers , la vie, le corps humain et notre assiette. Après plus de deux ans en Chine ce discours m’est quand même plus ou moins familier, mais quand elle tente de nos convaincre que vu la minorité d’hommes dans la pièce il va falloir cuisiner plus de bœuf (ou de soja, ou de racines de lotus, je ne sais plus), j’avoue que j’ai un peu plus de mal … Enfin je sais ce qu’il me reste à faire la prochaine fois que mon cher et tendre part en voyage !
Quelques jours plus tard tout autre programme, une mission économique amène le prince Philippe et la princesse Mathilde à Pékin. Grâce à l’insistance des diplomates de l’ambassade de Belgique les Belges de Pékin sont invités à plusieurs événements durant leur séjour et chacun se prépare à sa façon. Je discute robe et chaussures avec mes copines, les enfants parlent carrosses et couronnes. Grosse déception de Margot et Paul d’ailleurs quand Jeanne leur a affirmé qu’il n’y a que les princesses de dessin animé qui ont des couronnes. Devant l’air déçu de sa sœur elle a ensuite tenté de se rattraper en expliquant que de toute façon ce serait bien trop inconfortable dans l’avion ! Ces enfants voyagent trop …
Enfin dimanche après-midi les enfants et moi arrivons pimpants au musée d’art contemporain où le prince et la princesse devaient inaugurer une exposition et assister à une représentation de danse contemporaine. Protocole et sécurité obligent nous étions assis une heure avant l’arrivée royale, ce qui m’a valu un concert de « Z’ai soiiiiiiiiif, z’dois faire pipiiiiiiiiiii, c’est quand qu’elle arrive dis maman la princesse hein dis ? Et sa voiture elle est quelle couleur et comment tu sais ?? ».
Tant et si bien que quand enfin ils sont arrivés (on se serait cru à une réunion Saint Nicolas chez les lutins, l’excitation monte monte monte, ils sont là ah non quand même pas mais là j‘entends quelque chose et regarde tout le monde bouge vers là-bas) Margot qui était assise juste derrière la princesse (enfin juste derrière les VIP qui étaient juste derrière elle, vous suivez ?) a crié bien fort « Maman je ne vois pas la danse il y a la dame blonde devant moi ! » et Paul était inconsolable parce que la princesse bien elle n’était pas là, pas une seule couronne à l’horizon ! Le lendemain soir à une soirée nettement moins rocambolesque puisque sans enfants un parfait inconnu est venu me remercier pour le spectacle de la veille, non pas sur scène mais dans la salle !
Enfin conclusion la princesse elle est jolie, élégante, charmante, intelligente, gentille, tout le monde était sous le charme, même s’ils feraient bien de revoir le protocole et de lui imposer la couronne en toutes circonstances !
Après la semaine conte de fée il y a eu la semaine sorcière, Halloween oblige, et fidèle à ma réputation je me suis transformée cette année non pas en momie mais en sorcière, rousse s’il-vous-plait. Comme chaque année les parents ont monté une pièce pour les enfants et leurs institutrices, grand succès et beaucoup de fou rires, même si après quatre représentations j’étais complètement Iggety-Ziggety-Zaggety-Zoom (et j’offre une citrouille à celui qui reconnaît l’œuvre hautement littéraire sur base de cette citation !).
Ce soir c’était Halloween dans le compound et son défilé de petites sorcières, bébés déguisés en citrouilles et autres vampires. Les enfants sont rentrés ravis et épuisés avec des stocks de bonbons à faire d’évanouir n’importe quel dentiste.
Après les princesses et les sorcières je vais maintenant pouvoir me concentrer sur le bal de l’école, qui ara lieu début mars. Trop tôt pour le préparer mais on attend d’un jour à l’autre la décision quant à l’œuvre qui sera bénéficiaire (et les montant en jeu sont importants …). J’ai proposé de soutenir Morning Tears, une association créé ici par un Belge il y a quelques années. Ils s’occupent des enfants de prisonniers parfois condamnés à mort, en leur offrant un cadre familial, une éducation la plus normale possible et la possibilité de rendre visite à leur parent, voire de lui faire des adieux en cas de condamnation. Dans plus de 50% des enfants dont ils s’occupent il s’agit d’un des deux parents ayant tué l’autre pour échapper à une violence conjugale sans issue, et l’enfant se retrouve donc tout à fait seul, sans aucun de ses deux parents, le plus souvent rejeté par le reste de la famille. Ses enfants sont parfois retrouvés abandonnés sur le lieu du crime après l’arrestation du parent, ou errant autour de la prison où ils ont vu entrer le parent qui leur reste. Morning Tears tente de leur rendre leur enfance, de leur rendre un sourire. Avec le bénéfice du bal, ils pourraient aménager les deux nouveaux centres familiaux qu’ils construisent afin de pouvoir répondre à la demande grandissante. La décision devrait tomber d’un jour à l’autre, croisez les doigts !
Yunnan, nous revoilà !
Sachant qu’il ne nous reste vraisemblablement plus que quelques mois en Chine, nous avions hésité à retourner au Yunnan où nos avons déjà été deux fois, alors qu’il y a encore tant d’autres endroits à découvrir. Mais au moment où nos avons franchi le seuil d Linden Centre à Xizhou, on a su qu’on avait fait le bon choix . L’endroit est toujours aussi paisible et magique.
Cette fois-ci nous découvrons le village sous les couleurs d’automne, jaune comme les récoltes dans les rizières qui battent leur plein. On les observe du haut de la terrasse qui domine les environs, puis on se ballade dans le village, avec l’agréable impression de revenir dans un endroit familier, même à l’autre bout du monde. En rentrant les enfants se lancent avec les fils de Brian et Jeannee dans un combat de Kung-Fu acharné.
Brian et Jeannee et leurs deux fils de douze et quinze ans vivent ici à l’année. Ils se sont lancés dans une aventure assez risquée, mais qui s’avère une belle réussite. D’une demeure Bai (minorité ethnique importante au Yunnan) traditionnelle ils ont fait un hôtel sans rien changer aux structures d’origine, si ce n’est l’ajout de salles de bain. La plus grande des prouesses est certainement d’avoir obtenu et maintenu les autorisations tant il est inhabituel pour des étrangers en Chine de mener à bien ce genre de projets.
Au-delà de l’aspect hôtel, ils ont réussi le pari de s’intégrer dans ce petit village perdu au fin fond d’une province chinoise, et en plus d’y attirer des visiteurs toujours plus nombreux, impatients de découvrir les richesses innombrables de cette région.
A chacune de nos visites nos avons eu l’impression d’être invités chez des amis qui prenaient plaisir à nous faire visiter leur région. Car Brian et Jeannee sont des passionnés qui connaissent les coins et recoins de la région et sont amis avec chacun des villageois.
C’est ainsi que ce matin ils nous ont emmené à ne cérémonie au village voisin. Il s’agissait de s’assurer de la protection du village en apportant à sa frontière les tablettes représentant les dieux locaux. En arrivant a temple d’où il fallait sortir ces tablettes, nous y sommes accueillis en invités de marque. Très vite un attroupement de femmes se forme autour des enfants et moi quand elles réalisent qu’ils sont tous frères et soeurs. Puis elles remarquent le bracelet en jade que Jean-Michel m’avait offert lors d’un précédent voyage au Yunnan. Elles en portent tous et commencent à le comparer pour en arriver à la conclusion qu’avec quatre enfants j‘en avais bien mérité un si beau. Franche rigolade entre femmes de cultures et langues on ne peut plus différentes.
Là-dessus le cortège se met en route. Les femmes arborent leurs plus beaux costumes et portent des offrandes à travers le village pendant que les hommes font sauter des pétards pour faire fuir les mauvais esprits. Arrivés aux confins du village la procession s’immobilise pour une cérémonie d’offrandes devant les plaquettes. Pendant que je filme, Paul qui commence à avoir faim s’élance sur les plaquettes sacrées derrière lesquelles il a repéré des pommes et des bananes, l’en-cas parfait ! Avant le sacrilège ultime j'arrive heureusement à rattraper le chenapan. Dès la fin de la cérémonie mes nouvelles copines m’inondent de beignets aux couleurs inquiétantes, loin loin des critères de sécurité alimentaires occidentales …
L’après-midi changement de programme, nos partons pour une plantation de thé. Le Yunnan est très fier de son pu-er, thé fermenté délicieux qui comme le vin a des millésimes et peut se consommer jusqu’à plusieurs décennies après sa récolte. Il est très savoureux …sauf quand je le prépare à la maison où dans le meilleur des cas j’obtiens un jus de poussière. J’ai bien l’intention d’éclaircir ce mystère aujourd’hui !
Première étape , la cueillette. Chacun a une hotte sur le dos et s’applique à ne cueillir que les pousses vertes et tendres. Aux pieds de l’Himalaya se retrouver à cueillir du thé est une expérience hors du commun et les enfants adorent. Ensuite nos grimpons un peu plus loin dans la montagne jusqu’à une superbe cascade (dans laquelle les garçons manquent de glisser, mais ça c’est une autre histoire).
A notre retour commence le vrai boulot. Les feuilles sont d’abord séchées dans une grande poêle, puis roulées dans les mains pendant une bonne demi-heure avant de repasser dans la poêle. Une heure plus tard nos avons en main le résultat de notre cueillette prête à la consommation. Quand nous passons à la dégustation j’apprends que mes déceptions gustatives peuvent avoir autant de causes qu’on ne trouve de feuilles de thé dans ne théière … je ne suis pas sortie du hutong! Ca peut tenir à l’eau utilisée, sa température, le fait de rincer ou non le thé avant de le faire infuser, de jeter ou non la première voir seconde eau, l’endroit où on se trouve, l’âge du thé (et du capitaine je suppose), bref …
La Chine est le berceau mondial du thé, toutes les plantations ailleurs dans le monde (Inde, Sri Lanka) ont comme origine des plants chinois.
Toujours est-il que nous rentrons très fièrement avec notre thé home-made que nous gardons pour Valentin, grand amateur de thé dont c’est l’anniversaire aujourd’hui ! On est très loin du fade petit sachet jaune !
Si nous croyions bénéficier d’un repos bien mérité après une telle journée, c’est raté car dès la fin du repas nous partons à la chasse …aux sauterelles dans les rizières. Ca semble assez courant comme activité en cette saison car les champs sont parsemés de petits points lumineux comme autant de chasseurs armés de lampes de poche. Ces braves bêtes seront frites et servies en délicatesse au petit déjeuner, avis aux amateurs ! Ceci étant plaise au ciel que je n’aie jamais à survivre sur n régime de sauterelles car je ne suis franchement pas douée … (mais j’ai goûté courageusement, pas mauvais du tout !)
Vendredi matin Jeanne et moi suivons un cours de cuisine qui commence par le marché de Xizhou (où nous rencontrons des vendeuses de sauterelles frites à tous les coins de rue). Entre les têtes de cochon et les œufs de cent ans nous dénichons les ingrédients nécessaires à la préparation du repas de midi, dont mon fameux légume mystère d’il y a deux ans pour ceux qui se souviennent. Je repars moins bête, ça s’appelle d « lettuce root », de la racine de laitue. Une heure de découpe et de wok plus tard, après une savante alchimie de vinaigre de riz, poivre du Sichuan et sauce soya, toute la famille déguste une salade chinoise de concombres et un poulet gongbao qu’on retentera dès Pékin !
L’après-midi se passe en ballades dans les rizières a gré des rencontres avec les villageois qui récoltent et les enfants qui courent dans les rigoles poursuivant les sauterelles (rassurez-vous, de ce qu’on a vu l’espèce est loin d’être en voie de disparition). Fatigués on arrête une carriole pour aller faire n tour chez les brocanteurs du village, d’où on revient chargés de souvenirs. Brian qui nous accompagne chez l’un d’eux est ravi de nos trouvailles. Grand expert en art asiatique, il arpente à longueur d’année les greniers et arrière-cours des villageois à la recherche d’objets destinés en partie à leur galerie à Chicago mais surtout à la décoration de leur maison d’hôtes où Jeannee et li regardent en souriant les enfants jouer au base-ball dans la cour entre les vases et statues vieilles de plusieurs siècles.
Dernier jour de vacances déjà et nous sommes pris d’une flémingite aigue ! On la soigne avec application du haut de la terrasse et en se baladant dans le village où on reconnaît de plus en plus de têtes connues, tous nos amis de la semaine. Une dame nous invite à la suivre chez elle et nous offre un plateau de fruits tout en nous expliquant en détails son arbre généalogique –enfin on croît. Je me mets à rêver d’une vie de villageoise au fin fond de la Chine, à vivre au fil des saisons. Ca doit être l’effet Xizhou, qui représente pour nous la Chine sans tous les aspects qu’on n’aime pas, une parenthèse bienvenue.
Cette fois-ci les vacances sont bien terminées, cap sur Pékin !